TECHNOCENTRE : L’ACTUALITÉ
Où en sommes-nous au Technocentre, un mois après l’annonce du plan d’économie de 2 milliards d’euros ?
Depuis le 28 mai, 3 réunions du Comité Central Social et Économique (CCSE) se sont tenues sur ce projet. La dernière s’est tenue lundi 29 juin. Cette dernière séance était initialement la séance de consultation faisant suite à la séance d’information du 16 juin.
Un cabinet d’expertise ayant été désigné pour assister les élus lors de l’instance du 16 juin, l’ordre du jour de la dernière séance a été modifié en reportant la consultation après les travaux de l’expertise.
La séance du 29 juin est redevenue une « simple » séance d’information.
Cependant à la différence de la séance du 16 juin où la DRH France a présenté les dossiers, les présentations du 29 ont été réalisées par les patrons de l’Ingénierie, Gilles Le Borgne, du Manufacturing, José Vicente de Los Mozos et Patrice Haettel.
Rappel de quelques éléments de contexte.
Les prévisions de marché de 2017 prisent en compte à cette époque, dans le plan de marche de l’entreprise, prévoyaient une croissance du marché mondial de l’ordre de 6% soit environ 5 millions de véhicules supplémentaires. Or en 2019, le marché s’est retourné en finissant l’année à 5% en dessous de 2017 !
Cela représente un écart de 10 millions de vh. Nous avons fait un petit calcul, cela représente environ 250 000 vh de moins pour Renault en tenant compte de notre part de marché et de nos implantations. Avec un prix moyen compris en 10 et 15 000 € cela correspond à une perte de chiffre d’affaires de 2,5 à 3,7 milliards d’euros.
Cette hausse du CA était une condition nécessaire pour financer le développement des ventes. L’entreprise s’était dimensionnée pour cette croissance en investissant beaucoup pour atteindre un sommet historique à la mi-2019 à presque 12% de R&D+Capex par rapport au CA.
Mais des couts en hausse et des ventes en baisse ont poussé l’entreprise lors de l’annonce des résultats à sonner le tocsin !
Plus globalement, quasiment l’ensemble des grands constructeurs mondiaux auront engagé des restructurations cette année.
Comme si cela ne suffisait pas, la crise Covid-19 a privé l’entreprise de 90% de ses revenus pendant 2 mois. Un point cependant dans ce marasme que nous jugeons positivement est l’annonce faite par l’entreprise de la poursuite des règlements des factures fournisseurs dont la plus grande partie n’a pas les reins aussi solides que Renault. Sans fournisseurs, pas de redémarrage. Cela a contribué à creuser un trou de 5,5 milliards d’euros dans la trésorerie à la fin du 1er trimestre.
Les résultats semestriels qui seront annoncés en Juillet seront parmi les plus mauvais de l’histoire du groupe.
Petite lueur d’espoir, les clients semblent être revenus nombreux dans le réseau et les niveaux de commandes et de devis sont particulièrement bons. Les prises de commandes sur ZOE en juin s’élèveront à plus de 10 000. Les nouvelles incitations gouvernementales et l’offre de Renault dans les véhicules plus verts semblent porter leurs fruits.
Que propose la direction ?
La direction a présenté un plan visant à réduire les couts fixes de 2 milliards d’euros sur les 10 qu’elle supporte aujourd’hui.
3 contributeurs, l’ingénierie pour 800 M€, le manufacturing pour 650 et les frais de structure pour 700 M€.
Sujet numéro 1 pour le Technocentre, l’ingénierie, le plan vise une maquette effectif Ingénierie France à 5250 en 2022 pour 6450 aujourd’hui, soit une réduction de 1200 postes.
Comment la direction s’y prendrait ?
- les départs naturels
- les DA 2020
- des mesures qui restent à définir aujourd’hui dans le cadre d’un plan de départs volontaires (PDV)
Sur l’ensemble des 2500 postes supprimés dans les fonctions techniques et tertiaires principalement en Ile de France, les 2 premiers items couvrent l’objectif à 70%. Le futur plan de départ volontaire devra permettre la couverture à 100%. On le répète, pas de licenciement.
A noter que Gilles Le Borgne a confirmé que ce format « réduit » d’ingénierie corporate permettrait toujours de concevoir en France les véhicules remplaçants de segment A/B/C de la plaque Europe.
Il a d’autre part affirmé sa volonté d’être toujours en capacité de concevoir un véhicule de A à Z en France. Il ne peut y avoir de boite noire aussi anodine soit-elle dans la conception d’un véhicule.
C’est noté.
Des postes disparaissent mais le boulot reste…
Par un mécanisme « idéal », une partie de l’activité du corporate serait transférée dans les RTx, qui eux-mêmes externaliseraient auprès de prestataires locaux.
Les activités portant sur les sujets à haute valeur client où technologique ont vocation à être sanctuarisées en France.
L’activité à l’ingénierie diminuerait aussi par la réduction de diversité et des variantes qui ont tant fait souffrir la direction de la mécanique avec les différentes vagues d’homologations WLTP. Une réduction de 20% des modèles/variantes est ainsi visée.
Il est un fait connu par exemple, que la dédieselisation avec son pendant en matière d’électrification du parc va dans le sens d’une réduction de l’activité dans les secteurs de la mise au point moteur. Une MAP diesel = 10, une MAP essence = 5, une MAP GMP-E < 1 !
Autre piste, le recours massif à la simulation, au calcul et à une meilleure utilisation des supports d’essais doit permettre de réduire de 40% le budget des prototypes. Cela induit effectivement moins d’activités au CRP (logistique, préparation, montage…) et moins d’activités dans la phase d’utilisation des protos (instrumentation, roulage, essais, gestion…).
Les autres leviers d’économies…
Les budgets de prestations d’ingénierie seront réduits par la réduction des volumes d’affaires, par une renégociation des couts des contrats avec la localisation d’activités dans les « best cost country ».
Les frais généraux et administratifs de l’ingénierie produit seront aussi compactés de 25%.
La fameuse « footprint » foncière va être réduite, l’expérience du télétravail lors du covid-19 a ouvert le champ des possibles en la matière.
Pour l’ingénierie process très présente sur le Technocentre et dont la contribution à la réduction des effectifs France est de 300 postes, la démarche est très similaire s’agissant de la réduction et l’externalisation d’activités.
Le Technocentre sera touché aussi dans une moindre mesure par la réduction des effectifs dans les fonctions supports. 1000 postes principalement en IDF seront supprimés sur les 6582 actuels.
Les étapes à venir
Nous sommes au début de l’histoire et l’image n’est pas nette, il nous faudra faire le point pour avoir une image précise de ce que vise la direction. Nous n’avons pas aujourd’hui par exemple la nomenclature des postes qui seraient appelés à disparaitre. Un travail sur les compétences doit être mener en réactivant l’observatoire des métiers notamment. C’est l’idée de la forteresse de compétences pour le corporate.
Le CSE de l’établissement a été informé du plan d’économie. Il s’agit là d’une simple information sans le recueil des avis des élus.
Le Technocentre n’est pas comme le site de Choisy ou d’Alpine dans un processus d’information/consultation du CSE qui permettrait de recourir à une expertise des données présentées par la Direction.
Une expertise a été voté en CCSE le 16 juin. Les sujets Ingénierie produit et process et fonctions support étant des sujets du dossier présenté en central, ils seront pris à part entière dans celle-ci.
Cependant une négociation centrale s’est ouverte sur un accord de méthodes qui devrait permettre l’accès à l’expertise pour tous les sites concernés tout en organisant le dialogue social, par la création d’une instance paritaire par exemple. Nous espérons la conclusion d’un tel accord pour la fin juillet.
C’est à partir de ce moment que pourra être structuré le dialogue social local sur ce plan et évaluer le besoin complémentaire en expertise.
La vie reprend doucement…
L’activité reprend doucement son cours avec 2500 salariés présents cette semaine au Technocentre et 500 au CTA.
La reprise à 100% d’activité va redonner un semblant de vie pro « normale ».
Le télétravail reste le mode de travail privilégié pour le moment, même si certains secteurs de l’entreprise veulent faire croire le contraire.
La CFDT reste à votre écoute et vous souhaite un bon retour sur site et/ou de bonnes vacances !
(article modifié le 3/7/20 08:36)